« Le malheur, ce n’est pas le sexe. Le malheur, c’est le Patron. »

Mieux vaut allumer une petite bougie plutôt que de maudire l’obscurité ... disait une grand’mère bienveillante.

Le récent film de la danseuse Andréa Bescond et Eric Métayer, « Les Chatouilles », sort nationalement, peu avant la journée internationale des droits de l’enfant. Il fera probablement date. Il sait exposer comment se produit l’abus sexuel, comment y survivre, les réactions que peut entraîner le bris de la loi du silence. Il fait, à l’adresse des survivants et survivantes comme à celle de leurs proches attentionnés et à leurs amis, la démonstration - avec force et délicatesse - de ce possible qu’est REVIVRE envers et contre le très grave traumatisme subi.

Ce film - heureusement digne d’être critiqué - entre aussi dans cette heureuse danse qui guigne la fin du silence, le débouchage des oreilles, l’ouverture de l’esprit et du coeur, l’art d’aimer !
C’est qu’il importe encore et toujours de rendre la honte plus honteuse encore en la livrant à la publicité pour qu’enfin « Il faudra bien qu’on me laisse vivre, Après m’avoir tant fait mourir » (Théophile de Viau, insolent poète) ... tant « Le Coeur bleu est cet organe essentiel voué à grandir sans fin au point de ne plus pouvoir cacher aux yeux du monde les ecchymoses dont il fut bariolé. Le Coeur bleu est un coeur qui bat. » (Joël Arès - Le fils favori)

« Le malheur, ce n’est pas le sexe. Le malheur, c’est le Patron. » [1]

L’abus sexuel, c’est toute forme d’interaction sexuelle sous contrainte entre une personne et une autre, en position de pouvoir par rapport à la première.
C’est d’autant plus le cas lorsqu’un adulte - par le contact visuel, verbal, psychologique et par le toucher - se sert d’un enfant ou d’un adolescent en vue de sa stimulation sexuelle, ou de celle d’une autre personne. Cette interaction peut être exercée par la violence et, bien plus souvent, par une conduite séductrice.

L’abus sexuel incestueux, c’est des contacts sexuels sous contrainte à l’égard d’un enfant (ou d’un adolescent) de la part d’une personne qui ne peut être considérée comme partenaire sexuel adéquat, du fait de sa parenté « par le sang », de sa parenté par mariage (ou union), du fait d’être partenaire sexuel d’un ou des parents, du fait d’appartenance au cercle social et/ou d’amis de la famille ; en somme, de la part de quelqu’un en position de pouvoir par rapport à cet enfant qui, lui, devrait ordinairement en attendre protection et affection.

Parmi tous les ravages perpétrés par la domination, cet abus de pouvoir fait partie des traumatismes les plus destructeurs de l’être humain.
Il a un effet différent sur chaque personne ; ainsi les réactions caractéristiques et leur intensité varient d’une personne à une autre.
Il est naturel qu’à la suite d’une catastrophe ou de tout autre facteur de stress émotionnel extrêmement important - guerres, inondations, tortures, ouragans, accidents, agressions sexuelles, tornades, répression policière et militaire intense, abus sexuels, tremblements de terre, attentats, incestes, etc.. - des réactions, typiques et révélatrices, se produisent.
C’est ce qui est reconnu de nos jours comme « symptômes de stress post-traumatique » - auxquels il est heureusement possible de mettre fin.

Ces manifestations variées correspondent aux efforts tout à fait compréhensibles, ET UTILES, pour faire face ET SURVIVRE à un stress psychologique exceptionnel et intense, comme, précisément, c’est vécu en cas d’abus sexuel.

Un tel bouleversement de l’être produit telles ou telles de ces manifestations possibles, si familières aux survivants d’abus sexuel :

Amnésie (de ce qui s’est passé) - Fortes difficultés de concentration dans la vie de tous les jours - Détachement/retrait émotionnel - Réduction des réactions émotives ou Exacerbation des réactions émotives - Sentiment de se déconnecter à certains moments - Flash-backs - Sentiment de « ne pas habiter son corps » - Sentiment que « ce qui est autour de moi n’est pas réel » - Trous de mémoires temporaires - Conduites séductrices - Faire des autres des objets de consommation sexuelle - Attention défectueuse - Abattement, blues, déprime - Cauchemars - Sommeil troublé - Tentatives de suicide - Culpabilité - Mésestime de soi - Honte - Dépendance affective - Dégoût de soi - Conduites auto-destructives diverses (agressivité soudaine ou permanente ; consommation intense d’alcools et de diverses substances nocives ; blessures intentionnelles infligées à soi-même pour se sentir exister ou pour ne pas se sentir vide ; se faire objet de la consommation sexuelle des autres) - Boulimie et/ou Perte totale d’appétit - Désespoir - Dans la vie sexuelle, absence de plaisir ; douleurs - Fortes difficultés à faire confiance en quelqu’un, et/ou l’inverse ...

Cependant il est possible de se remettre d’un tel traumatisme.
En effet chacun possède tout ce qui est nécessaire pour y survivre - que ce soit la ténacité, l’énergie, les capacités et les ressources - et construire une nouvelle vie. Et certains s’en remettent effectivement, par divers moyens - dont la danse pour Andréa Bescond - d’où la création du mot « résilience ».

C’est aussi, souvent, en trouvant des oreilles, de l’écoute qui entend, en même temps qu’une aide concrète proposant des outils permettant de se libérer de ces « symptômes » de stress post-traumatique, de sortir et d’éliminer les souvenirs cuisants, d’envisager et de construire ainsi dès maintenant une vie à venir débarrassée de toutes ces adversités.

C’est éminemment favorisé quand la personne abusée est crue et soutenue par les non-abuseurs de son entourage, quand existe une relation de qualité entre lui et ses parents, quand les parents non-abuseurs ont pu surmonter le choc du dévoilement pour se centrer sur leur enfant.

La préférence de qui écrit ces lignes va plutôt - loin de la démarche psychanalytiquement inspirée de la psy du film [2] - vers une démarche d’aide thérapeutique plutôt brève et surtout orientée/centrée sur la solution associée à l’hypnose éricksonnienne : elles permettent de résoudre les abus sexuels du passé et de mettre au point des perceptions et et des façons de faire et d’être nouvelles, afin de remplacer utilement celles qui reposaient sur le traumatisme subi.

Quant à ces M’sieurs-Dames les écornifleurs de l’âme, suppôts de Freud, H. Ey, Lacan, F. Dolto et autres J. Oury de Sous-bois de La Borde, le jeune poète Isidore Ducasse l’avait énoncé :

« Toute l’eau de la mer, jamais, ne saurait laver une tache de sang intellectuelle ».

De nombreux survivants à l’abus sexuel ne s’y trompent plus. Ils refusent de devenir du gibier d’H.P. et de ses succursales, déjouent les étiquettes et discours invalidants, se tiennent à distance des drogues délétères prescrites et savent se détourner de ces consultations !

*

Déjà, quelques livres bénéfiques recommandables :
Le viol du silence de Eva Thomas, éditions J’ai lu
Le sang des mots de Eva Thomas, éditions Desclée de Brouwer
La Porte du fond de Christiane Rochefort, éditions Grasset
Le Fils favori de Joël Arès, éditions du Rocher
Notre corps ne ment jamais de Alice Miller, éditions Flammarion
L’abus sexuel à l’encontre des enfants / Petit dictionnaire des idées reçues, éditions Parole d’enfants Liège / Belgique
Pardonner : Tyrannie ou libération ? de Sylvie Tenenbaum, InterEditions
Guérir de l’abus sexuel et revivre de Yvonne M. Dolan, éditions Satas/Collection Le Germe
L’art d’aimer de Erich Fromm, éditions Belfond

Notes

[1Christiane Rochefort (dans « La Porte du fond »)

[2Nous l’y voyons à l’oeuvre, d’emblée quelque peu intimidée et surtout désemparée par l’irruption d’Odette dans son cabinet, lui déposant son cuisant paquet, puis apprenant beaucoup à son contact.

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