« Vive le vent, vive le vent vive, vive le vent d’Ana,
boulons tèj’ et coups de vent et le pylône tomba. »
Un drôle de message sur la THT de l’EPR de Flamanville dont un pylône a flanché sous la tempête Ana il y a quelques jours, entre Villedieu-les-Poêles et Saint Lô (Manche) :
Dimanche 10 décembre 2017 au matin, stupeur sur le Mont Robin à Montabot (pile poil entre Caen et Rennes) ! Le paysage n’est plus le même. Mais où est passé le pylône numéro 220 ? Là où avait eu lieu il y a cinq ans, le camp de Montabot [1], il a chu enfin. Rebelote, bol d’air, on remet le couvert, comme un retour en 2012, la ligne est à nouveau débranchée. 135 kilomètres de ligne THT sans électricité et retour des engins de chantiers.
Malheureusement RTE [2] et sa politique, eux aussi sont de retour. Ça n’étonnera ni les habitant-es du coin qui ont connu l’imposition de ligne, ni celles et ceux qui luttent encore aujourd’hui [3] contre RTE, la méthode est toujours la même. Évidemment, aucune information n’est donnée à la population.
Imaginez-vous rentrer de week-end, trouver la route barrée et pas d’accès jusqu’à votre jardin. Au bout de celui-ci, vous découvrez, chaviré, ce pylône. Pas un mot dans la boîte, pas un technicien à la porte. Et pourtant, vous apprendrez que tous ces spécialistes ont failli vous évacuer à la salle des fêtes du coin de peur que les pylônes voisins ne s’écroulent à leur tour. Seuls les cancans du village peuvent faire passer un tant soit peu les informations.
Dans le même temps, la presse locale n’oubliera pas de communiquer sur la force logistique de RTE, leur « maîtrise de la situation » et le fait qu’il n’y aura pas de coupure de courant dans les foyers. Sans blague : quand on sait que la ligne ne sert à rien, pas étonnant. RTE joue donc bien un double jeu : « Il ne s’est jamais rien passé » d’une part (aucune info dans la presse nationale et un rafistolage rapide) et « on contrôle tout » de l’autre.
Pour rappel, cette ligne construite pour l’EPR [4], toujours pas en route, a pourtant été précipitamment raccordée (avec des pinces crocodiles) dès la fin du chantier en mai 2013 pour couper court à toute contestation. Cette ligne expose des populations alors qu’elle ne sert qu’au délestage de l’électricité produite à la centrale nucléaire de Flamanville. C’est bien représentatif du mépris de RTE pour les personnes qui vivent dessous.
Contrôle oui, routes barrées sans motifs, gens d’armes sur toutes les petites routes, papiers, alcootests et fouilles des véhicules : quel est le rapport ? Contrôle du chantier, pas sûr. Dans sa course pour faire croire que rien ne s’est passé, RTE a redressé en moins d’une semaine ce qui reste du pylône, et bricolé une fixation provisoire, priant pour que le tout tienne jusqu’au remplacement définitif en janvier 2018. Soyons clair, nous ne demandons pas plus de sécurité sur les lignes THT, mais de continuer le démantèlement tel qu’il a bien été commencé !
Si les déboulonnages symboliques [5] restent des menaces contre RTE, le vent quant à lui réalise le rêve des opposant.e.s. Et si d’autres pylônes ne comptaient pas tous leurs boulons, quel coup de vent nous en débarrassera ?
Le danger vient de la ligne elle-même, et non pas de celles et ceux qui se battent contre elle, que ce soit le vent farouche ou les petites mains agiles des déboulonneurs et déboulonneuses.
Si la lutte dans la Manche semble avoir pris fin, un évènement revigorant comme celui-ci rappelle qu’elle continue ici comme ailleurs, contre RTE, le nucléaire et son monde. Comment alors ne pas se réjouir de sentir les lignes à nouveau vulnérables ? Chaque coup porté contre l’industrie nucléaire est une épine dans son pied.
Alors que les appels à solidarité pleuvaient depuis Bure [6] et l’Aveyron, le vent et ses comparses semblent avoir répondu à leur manière.
Que les bourrasques gonflent et emportent avec elles le projet de poubelle nucléaire, le méga transfo électrique, et leurs plans capitalo-mégalo-facho !
Que le vent souffle encore !
Rien n’est acquis, rien n’est fini.
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