À Rouen, le nombre de mineur.e.s isolé.e.s non pris en charge s’accroît depuis plusieurs mois. Entre mai dernier et leur expulsion mi-octobre, ces mineur.e.s isolé.e.s, comme leurs aîné.e.s (en tout près de 180 exilé.e.s, dont presque 60 mineur.e.s), avaient pu trouver refuge dans un lieu ouvert dans une ancienne maison de retraite rouennaise, la Garenne. Ces enfants sont désormais à la rue, alors que leur sécurité devrait être assurée par l’ASE (Aide sociale à l’Enfance), gérée par le département. Celui-ci met tout en œuvre pour ne pas leur attribuer de places, afin de ne pas créer « d’appel d’air ». Le but est d’apparaître comme un département peu accueillant, afin que les réfugiés ne viennent pas en Seine-Maritime. Ce faisant, le département se met hors la loi. C’est d’abord pour mettre sur le devant de la scène cet illégalisme officiel, qu’accompagné.e.s par plusieurs collectifs et associations, une vingtaine de ces très jeunes gens ont occupé pacifiquement un amphithéâtre de notre université le 14 novembre. Ils demandaient juste à s’y mettre à l’abri en attendant que le département, les mairies, les services sociaux, trouvent une solution.
Le président de l’université Joël Alexandre les a fait expulser de sa propre autorité. Il a envoyé la police sur le campus, contre des jeunes qui ne demandaient rien d’autre que l’application de la loi. Il a fait traiter par la brutalité policière une demande de justice et de droit. Cette intervention de police a également visé un local syndical, celui de l’UNEF qui avaient convié les jeunes migrants. Les forces de l’ordre ont forcé l’entrée de ce local et pratiqué un « tri » selon la couleur de peau, appliquant de la sorte une procédure révoltante, discriminatoire et sans conteste raciste.
Lors du conseil d’administration qui a suivi ces faits très graves deux jours plus tard, Joël Alexandre n’a pas eu un mot de regret sur ces interventions policières. Il a cyniquement suggéré que l’université pourrait organiser une journée d’étude ou un colloque sur les migrants, enjeu devenant ainsi, dans sa bouche, purement abstrait et académique quand les migrants, les vrais, en chair et en os, sont expulsé.e.s manu militari d’un espace où ils et elles devraient être protégé.e.s. Il est certain qu’il nous faudra poursuivre la réflexion et l’action, y compris sous la forme de journées d’études et d’initiatives, avec celles et ceux qui depuis des années, travaillent sur les migrations et sont partie prenante de solidarités concrètes. Mais nous refusons leur instrumentalisation par une présidence qui recourt aux gens armés contre ceux qui deviennent par là même des objets d’intérêt déshumanisé, des personnes humiliées et violentées. Cette violence et cette humiliation, nous les ressentons avec elles.
Ne laissons pas s’exercer la lente pente de l’indifférence. Ne nous habituons pas aux interventions policières dans nos universités. Ne contribuons pas à les banaliser. Il en va là des droits fondamentaux de la personne humaine, de l’éthique de nos métiers et de nos engagements. Le savoir ne saurait se transmettre dans l’aveuglement et l’insouciance face à l’indignité et la violence qui viennent s’exercer jusque dans notre université.
Nous appelons les étudiant.e.s et l’ensemble des personnels à la grève et à la suspension des cours le jeudi 22 novembre. Nous les invitons à prendre part aux débats sur ces faits d’une gravité sans précédent et sur les valeurs que, contre eux, nous voulons défendre coûte que coûte. Nous irons manifester ce jour-là devant la présidence puis à l’hôtel du département pour rappeler ces deux exigences élémentaires :
- pas de police à l’université
- protection et hébergement des migrants.
Avec le collectif étudiants de défense des migrant-es
Compléments d'info à l'article